mercredi 15 janvier 2014

Daft Punk


Le dernier opus du groupe électro Daft Punk a réussi là où les armées napoléoniennes et celles des forces de l'Axe avaient échoué. Ces morceaux de bravoure musicale ont envahi les ondes planétaires de l'été dernier, et les casques intégraux de nos cyborgs "humains robots" ont assiégé et inondé les devantures des disquaires (il en existe encore) du monde entier.
Comme tout quinqua (je n'aime pas ce mot) qui a dansé sur Midnight Express, j'ai adoré. Alors j'ai aussi acheté tous les albums précédents de ce duo inventif. D'autres les auraient téléchargés, mais mon manque total de connaissance en télématique me cantonne dans le droit chemin. Ces albums sont excellents, et leur éclectisme fait plaisir à entendre. J'ai aussi retrouvé un live de 2007 laissé par mon fils, Daft Punk Alive, et je l'ai écouté un moment en boucle dans ma Twingo.
    Au-delà de la maîtrise et de la qualité réelle des morceaux joués à Bercy, j'ai été ébahi par le public. Il envahissait la bande son.
    Evidemment, ce sont uniquement des adeptes du groupe, des aficionados connaissant par coeur tous les disques des génies de l'électro. Des inconditionnels qui avaient obtenu leurs billets de haute lutte. Une amie de ma fille avait eu le bonheur d'en être, elle a encore les larmes aux yeux chaque fois qu'elle évoque cette soirée où elle a été soulevée, emportée par les dieux.
     Du haut de leur pyramide de lumière, les deux maîtres de cérémonie commencent à officier. Trois notes suffisent, et le public se met à hurler en reconnaissant le premier morceau. Débute alors un déferlement d'énergie brute qui renaît comme un phénix, toutes les minutes pendant la totalité du spectacle. C’est un coup de tonnerre qui dure deux heures, un éclair en boule qui roule, roule et roule encore, une ola de feu tout autour de l'immense salle zébrée de lasers et chauffée à blanc.
     Et je me dis, pour avoir pratiqué longtemps une vie familiale habituelle, que j'ai du mal à reconnaître dans cette bombe d'énergie pure, les mêmes adolescents tout mous et tout rassis qui ne savent pas que le matin existe, et émergent pour vaguement petit déjeuner, quand le five o'clock tea est déjà servi. Comme avec une pile électrique dont on ne relie pas les deux extrémités, il ne se passe pas grand-chose. Qu'est-ce qui peut bien les anesthésier de la sorte, les tétaniser dans leur lit?
      Je n'ai pas la réponse, mais je me dis que c'est dommage de ne pas faire jaillir en permanence toute cette fougue, de ne pas donner envie. Et si l'envie est absente, rideau, on reste en veille.
      Il est vrai que ce n'est pas en regardant leurs parents remuer comme des insectes sur le dos qu’ils auront envie de rentrer dans la danse quotidienne, dans le train-train routinier. Ce que le monde des adultes propose aujourd'hui à sa jeunesse n'est pas très réjouissant, un strapontin, une place debout, un nom sur liste d'attente. Pas étonnant que le monde virtuel soit si attirant, paré de toutes les vertus qui manquent au réel.
      Peut-être pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, les vieux et moins vieux pensent que ce qu'ils vont laisser à leurs descendants est moins bien que ce qu'ils ont trouvé. « Ben tant pis, après nous le déluge, on est nuls, mais on ne sera plus là au moment de rendre des comptes. On s'en tire pas si mal.» 
    Bon, Platon se désespérait déjà des jeunes de son époque, nous on se désespère des vieux de la nôtre. Finalement, c'est plutôt encourageant, voire positif!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire