vendredi 18 mars 2011

Partir en fumée? Non merci


Il est hors de question que je me fasse incinérer.
Comme il me sera difficile d'exprimer mon opinion lorsque le choix se présentera, je tiens à le clamer haut et fort dès maintenant.
Quoi? A peine mon petit moteur interne éteint, à peine mes deux soufflets à oxygène enfin au repos, il faudrait aussitôt mettre en route tout un attirail effrayant, bruyant et brûlant? Pas question. J'aurais l'impression de quitter le monde une deuxième fois, en fumée. Puisqu'il faut mourir, j'ai le choix de faire un trajet bio, sans brûler les étapes.
Eh oui, la mort est bien encombrante, elle n'a plus sa place dans notre monde d'apparences. Qui parmi nous a déjà vu un mort? La mort,, on veut la nier, la grimer, la maintenir à distance. Alors, l'incinération, c'est pratique, propre et moderne. Le feu purifie, la flamme monte "pure et légère vers le ciel étoilé", et les cendres s'envolent, très photogéniques comme sur la route de Madison.
Eh bien je m'inscris en faux. J'aime à imaginer la pourriture s'insinuant lentement dans mes entrailles, surgissant de mes entrailles. Il faut un cercueil en bois naturel, fin, sans vernis ni produit antibactériens. Un bois qui retourne vite à la terre, et laisse mon corps dans l'humus régénérateur d'un cimetière mal entretenu. Je veux imaginer ce corps creusé par les taupes, visité par les limaces, nettoyé par les lombrics et les fourmis. Je veux que doucement mes humeurs se diluent dans l'humus, mes molécules retournent dans le cycle de la vie. Je ne suis pas propriétaire de ce corps, je l'ai juste emprunté à la terre, à l'air, à l'eau et au feu. Une étincelle dont je ne comprends pas bien l'origine l'a animé un moment, mais il est temps maintenant de rendre son dû à la nature. Qu'à donc à faire la nature de mes cendres? Un petit Hiroshima à chaque mort, la nature nous dit merci! Vous avez vu Pompéi sous la cendre?
Le corps humain est 100% recyclable, et la recette est si simple: faire un trou dans la terre, enfouir le corps, le recouvrir de terre, laisser reposer.
Et tant qu'on y est, j'aimerais aller directement à la fosse commune. J'aime cette idée d'un brassage oecuménique de chairs et d'os de toutes origines. La communauté des hommes et des femmes enfin réalité.
J'aime à rêver que quelques particules de mon ex-moi se retrouveront par exemple dans le coeur excité des passereaux qui saluent le soleil levant, ou dans les coquilles des escargots qui se hâtent sur les murets moussus, ou dans le cerveau du futur Mozart...

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